Le bonhomme est sympathique, sa cuisine gagne à l'être. Cela se passe dans cette arrière salle séparée du bar en marqueterie par une demi cloison en bois qui est un échantillon de ce que le 20ème siècle balbutiant avait de meilleur à offrir en matière d'arts décoratifs (verres gravés, marbres, boiseries, carrelage d'époque). Sans surprise à chacune de mes visites dans l'un des fiefs bistrotiers de Cyril Lignac, je ne ressens ni chavirement ni déception, rien qu'une indifférence las, du plaisir mais mis en sourdine, un potentiel mais comme engoncé dans un vêtement trop étroit.
Le menu déjeuner à 27 € n'a rien d'odieux mais il faudrait autre chose que ces ridicules mini asperges blanches comme sorties d'un bocal de grande surface ou cette mâche barbouillée d'une vinaigrette décapante montant la garde devant un œuf mollet frit certes très réussi (cuisson excellente, panure croustillante, texture tout sauf grasse) pour m'envoyer au 7ème ciel.
Même constat avec le cabillaud cuit en nage nacré à merveille, retranché derrière une inévitable et déjà has been émulsion, arrosé de lait de coco même pas pimenté ni relevé d'épices qui endort les petits légumes de saison (épinards, effiloché d'asperges, radis) quand on aimerait qu'un peu de fougue, d'audace et plus de mordant, électrise ce plat bien trop sage. Autant dire que le petit frisson de se faire désespérément attendre.
Le point de bascule, la révélation arrive quand on ne l'attendait plus, dans la dernière ligne droite du repas avec cette part de tarte au citron et sa crème meringuée légèrement acidulée, très onctueuse, au goût très intense (le jus de citron aurait préalablement été épaissi) et sa pâte qui emporte tout sur son passage, croquante, renversante. C'est un peu tard. On aurait souhaité être ému, rencontrer cette grâce plus en amont dans le repas, inégal et sans génie.
Le Chardenoux
1 rue Jules Vallès
75011 Paris
01 43 71 49 52
www.restaurantlechardenoux.com