Sur la route de Split, ce mirage, cette merveille de la nature qui prend aux yeux, aux tripes et m'oblige à descendre de l'autocar. Ma destination d'origine était Split, changée d'un coup de baguette magique en Primosten, un nom ingrat sinon affreux pour résumer toute la magie de ce petit bourg médiéval bâti sur une presqu'île, flanqué d'une seconde couverte de pins et de plages de galets qu'entoure une eau turquoise.
Les paysages qui nous retournent, nous secouent jusqu'à nous briser le cœur (et de repenser à la scène inaugurale de La Grande Bellezza ou un touriste asiatique de passage à Rome s'écroule raide mort devant tant de beauté), se distinguent souvent des autres en cela qu'ils sont autrement plus délicats à aborder voir impossible à immortaliser.
On ne sait comment s'y prendre. L'angle n'est jamais le bon, la lumière toujours voilée ou à contre jour; trop de gens sur les plages, pas assez d'émotion, trop carte postale.
De dépits, je renonce et me contente d'images médiocres que je jetterai probablement dans les jours à venir, les plus belles du présent article (exclusivement des vues aériennes) s'avérant empruntée à plusieurs sites.
Rien ou si peu, alors, des chemins longeant les presqu’îles où j'aime à me promener avec la mer à mes pieds repoussée sans violence par des rochers ou fixe comme une image aux pieds des galets. Je ne vois rien de plus beau que les îles au loin, le turquoise de la mer et la possibilité de séjourner dans une de ces pensions avec terrasse à l'étage à la pointe extrême du village.
C'est de savoir qu'inévitablement on reviendra dans ce lieu qui nous a fasciné et qu'on a profondément aimé qui rend l'appareil désespérément muet comme si seule la banalité devait lui rendre son souffle. A moins que désireux de conserver intacte cette émotion on s'efforce de la soustraire au ''plaisir nécrophilique du cela a été'' propre à la photographie qu'expose Roland Barthes dans sa Chambre Claire. Question appétit c'est la même chose: à souffle coupé, estomac noué et aucune envie de goûter à la parodie de cuisine qui se joue entre les vieilles pierres du village, où les poissons dits ''locaux'' sont péchés en Atlantique et tristement accommodés de pomme de terre bouillies. Reste le poulpe, capturé dans les environs et excellent dit-on en salade. Encore faut-il aimer.
Heureusement, reste la solution de replis locale et peu onéreuse: un take away pas plus grand qu'un placard où une dame sort à la minute de ses friteuses des anchois tout ce qu'il y a de plus délicieux dans leur robe de panure légère, on dira estivale.
Deux premières images empruntées à:
www.sunsail.eu