Il arrive qu'on passe à côté des villes comme on passe à côté des gens, voir de soi même. On arpente la ville sous toutes ses coutures, on a les yeux grands ouverts et on ne voit rien. On est plein de bonne volonté et la ville continue de nous glisser entre des doigts. On était à Kuala Lumpur mais c'est comme si on n'y avait jamais mis les pieds.
On avance des raisons à cet échec (lassitude, fatigue passagère, manque d’appétit, peut-être les trois à la fois à moins que la véritable raison tienne dans l'usage systématique en Malaisie des additifs alimentaires et autres exhausteurs de goût comme le glutamate qui malmènent le corps, l'épuise.) On se dit que la rencontre ne s'est pas faite et qu'elle se fera une autre fois, à la faveur d'un nouveau voyage.
On ne reste pas éternellement avec nos regrets au fond de la gorge, on a l'énergie de dîner dans un petit marché de nuit, de palourdes cuites à l'étouffée dans une sauce tomate épicée. On se dit que c'est divinement bon mais c'est de nouveau une grande fatigue qui nous s'empare de nous et nous commande de rentrer nous coucher. Jusqu'au bout Kuala Lumpur se refusera à nous.