Quel dommage. La région entourant la petite ville tranquille de Di Linh est luxuriante et réserve pleins de surprises avec ses collines boisées, ses potagers qui tapissent la vallée, ses rizières, son village alpin et quantité de sentiers s'enfonçant dans la forêt.
Seulement, c'est ici même, à 80 km de Dalat que la maladie me surprend, me coupe les jambes et me cloue au lit après avoir brûlé mes dernières forces dans deux plantations de thé plutôt mal entretenues (les plants apprécieront le voisinage forcé avec les vaches), la première appartenant à la compagnie taïwanaise Vina Suzuki - spécialisée dans le oolong dont une partie de la production est bio - la seconde commercialisant uniquement du thé au lotus (d'où l'état discutable de la plantation).
A propos de thé au lotus, une légende circule selon laquelle le roi Tu Duc de la dynastie des Ngyen, faisait beaucoup parler de lui pour sa façon très spéciale de boire cette boisson (qu'on ne peut que lui envier). On raconte en effet que la veille de la dégustation, ses servantes se rendaient sur le lac royal où poussaient les lotus et déposaient dans chaque fleur une petite poignée de thé. Une fois imprégné du parfum de la fleur, le thé était récolté puis offert au roi.
On se souvient que l'eau servant pour la préparation du thé doit être une eau naturelle et pure (l'eau vive des ruisseaux, celle dévalant des rochers qui faisait le délice des moines chinois et japonais isolés dans leurs monastères). La meilleure est parait-il la rosée qui se dépose la nuit sur les feuilles de lotus. Plus ordinaire est l'eau de pluie conservée dans les feuilles d'aréquier, ces grandes palmes qui recueillent l'eau du ciel. Aussi, malade, je ne me nourris pas autrement que de thé et de mangue bien mûres. Une autre forme d’ascèse.